A l’heure de la « concurrence libre et non faussée », il est de bon ton de mettre en compétition les productions des sociétés humaines, quels qu’en soient la finalité et le mode de consommation. Or la formation professionnelle, comme l’éducation, la santé, l’accès à l’énergie et à l’eau…, n’est pas, à nos yeux, une marchandise comme les autres. Chacun doit avoir le droit, quels que soient ses origines et son parcours, à une formation qui lui offre compétences et autonomie dans la pratique d’un métier. C’est l’égalité de tous et de toutes face au droit à la formation que nous défendons.
C’est pourquoi je suis favorable à la création d’un véritable service public de la formation qui inscrive sa relation avec les écoles, publiques et privées, dans une logique de coopération et d’intérêt général. C’est aux pouvoirs publics de fixer les priorités en matière de formation professionnelle et d’en définir les politiques budgétaires. Et qui est mieux placé que les structures de l’économie sociale et solidaire, associations et coopératives (l’emi est une scop), pour en être les partenaires privilégiés ? Car celles-ci se situent non pas dans une logique de rémunération d’actionnaires et de recherche de profit, mais de service rendu à la collectivité.
D’un autre côté, nous formons des journalistes, des graphistes et des éditeurs.
Si l’on veut ne pas reproduire à l’infini les dérives clientélistes d’une partie de la presse, n’est-il pas important d’armer les générations futures afin qu’elles fassent preuve d’indépendance d’esprit et de maîtrise des nouvelles formes de narration et de traitement de l’information ? N’existe-t-il pas une autre voie possible que celle d’avoir à subir des journalistes aux ordres ou des amateurs rhabillés en experts ?
La sphère des médias devrait aussi être – en partie – soustraite à la loi du marché. Je vous rassure… je ne milite pas pour la nationalisation de la presse. Mais pour que la collectivité, consciente que le droit à une information libre est un bien commun, soutienne l’émergence de médias indépendants.
Notre métier, à l’emi, est au cœur de deux champs, celui de la formation professionnelle et celui des médias. Qui, l’un et l’autre, relèvent de l’intérêt général. C’est pourquoi nous ne nous résoudrons pas à être de simples marchands de stages et d’informations.
Il y a quinze ans, je titrai mon éditorial : « Former pour informer ». Cette formule me paraît plus que jamais d’actualité.
François Longérinas, président-directeur général de l’émi